Annelise Heurtier livre une nouvelle fois le portrait d’une adolescente d’aujourd’hui avec justesse. En parallèle, elle évoque le récit poignant d’immigrants à la recherche d’une vie nouvelle.
Été 2006. Pour les grandes vacances, Milla, jeune Italienne de 17 ans, revient avec ses parents sur l’île de Lampedusa, dans la grande maison familiale un peu défraîchie où elle n’est plus revenue depuis ses dix ans. L’ambiance est pesante, hantée par le souvenir obsédant du petit frère de Milla, Manuele, emporté par la maladie âgé de quelques mois.
Pourtant Milla parvient peu à peu à retrouver de l’allant, grâce aux décors enchanteurs de l’île et à la présence réconfortante de Paola, une étudiante rayonnante un peu plus âgée qu’elle, qui l’a prise sous son aile. Lampedusa, que l’on surnomme « l’île du Salut », démontre une fois de plus les vertus bénéfiques de ses atmosphères paradisiaques.
Mais du paradis à l’enfer, tout n’est peut-être qu’affaire de perspective. Car à quelques kilomètres, c’est un tout autre drame qui se joue : entassés dans un zodiac misérable, fugitifs de leur propre pays après avoir risqué mille morts et enduré mille souffrances, une demi-douzaine de jeunes Erythréens jouent leur existence sur une mer déchaînée…
Annelise Heurtier signe un roman touchant et puissant, qui parvient à donner du drame des immigrants clandestins une vision intime et profondément humaine. Cette histoire est malheureusement ancrée dans la réalité avec tous ces migrants, arrivants par milliers sur les cotes européennes, Eldorado pour lequel ils risquent leur vie.
Refuges, d’Annelise Heurtier, éd. Casterman, 240 p., 12 euros. Dès 14 ans
Voici un mot de l’auteur : « Le 15 avril est sorti en librairies Refuges, mon dernier roman « ados et + », publié aux éditions Casterman. Il revient sur le destin peu médiatisé des Érythréens qui fuient la dictature de leur pays et qui tentent de venir vivre en Europe, via Lampedusa : une entreprise désespérée et cauchemardesque à travers le Soudan, la Libye, entre tortures, rafles des bédouins qui les tuent pour revendre leurs organes, enfermement…
J’ai travaillé pendant de nombreux mois avant de commencer à écrire ce texte, en me documentant via des reportages de journalistes, des rapports d’ONG du monde entier ou d’autres associations visant à aider les migrants.
Peut-être que ce roman permettra de considérer d’un œil différent ces milliers de clandestins qui frappent aux portes de l’Europe. Derrière l’anonymat, la catégorisation effectuée par les médias se cachent autant d’histoires individuelles, jeunesses fracassées, espoirs immenses.«