« Elle s’appelait Tomoji » raconte l’enfance d’une Japonaise au début du XXe siècle : un album magnifique !
Tomoji vit dans la campagne japonaise au nord du mont Fuji : elle admire la nature devant elle. Fumiaki, lui, fait ses premiers pas de photographe et arrive chez Kin Uchida, la grand-mère de Tomoji. Il n’est autre que le cousin de la jeune fille. Le jeune homme est venu photographier la vieille femme et le jour tombe. Pas le temps d’attendre Tomoji.
Les jeunes gens ne se croisent pas. Si l’auteur, Jirô Taniguchi, va mettre en scène la rencontre entre ces deux adolescents dans le Japon rural de l’entre-deux guerres (1925-1932), il va auparavant raconter l’enfance de Tomoji Uchida, la co-fondatrice du temple bouddhiste de Shôjushin, dans la région de Tokyo.
Tomoji vit une enfance heureuse au milieu des montagnes avec des parents aimants. Pour son premier anniversaire, toute la famille se rend chez le photographe de Nirasaki, à vingt kilomètres de chez eux. Sa petite soeur Masaji vient au monde alors que Tomoji a 2 ans. Mais, tout bascule, le père de Tomoji, 3 ans, meurt. Plus rien ne sera comme avant.
Et la situation s’aggrave même lorsque la mère de Tomoji retourne chez elle et laisse ses enfants. La jeune fille a désormais 7 ans et entre à l’école. Elle marche plus d’une heure par jour et quand elle rentre chez elle les travaux ménagers l’attendent… Puis, sa petite soeur décède. Tomoji a 9 ans.
En 1923, un tremblement de terre ravage Tokyo et sa région. Pendant trois jours, les répliques se succèdent. Pour se protéger Tomoji, Toyô et leur grand-mère dorment dans la forêt. De son côté, Fumiaki Itô, lui, a échappé à la mort et réalise son rêve : à 18 ans il étudie l’anglais à Tokyo. Il faudra encore quelques années avant qu’ils ne se rencontrent…
Une belle histoire racontée par un maître du manga. Jirô Taniguchi livre un album intimiste qui permet au lecteur de découvrir l’enfance de cette femme, entre petites joies et peines immenses. Le courage dont fait preuve cette jeune fille est récompensé au final. Elle poursuivra ses études et partira même à Kôfu pour y suivre des cours de couture.
Les planches sont finement détaillées. Certaines sont colorées, mais la plupart sont en noir et blanc et apportent un peu plus d’authenticité comme si elles dataient de l’époque où l’histoire se déroule. La vie défile lentement sous les yeux du lecteur, rythmée par les saisons et découpés en chapitres conclus un encadré avec l’âge de l’héroïne. Magnifique.
Elle s’appelait Tomoji, de Jirô Taniguchi, éd. Rue de Sèvres, 120 p., 17 euros. Dès 10 ans
L’auteur raconte en fin d’album : « La naissance de cette histoire est liée à un temple bouddhiste de la région de Tokyo. Ma femme fréquente ce temple avec assiduité depuis une trentaine d’années, et moi-même je m’y rends de temps à autre, même si je ne suis pas un pratiquant régulier. A la longue, nous sommes devenus familiers de ce lieu et de ceux qui l’animent, ce qui les a conduits à me solliciter pour que je dessine quelque chose dans leur bulletin trimestriel. Leur idée était simple et claire : valoriser ce qui fait la particularité de ce temple, et notamment mieux faire connaître la personnalité et le parcours de sa créatrice (…). J’ai accepté leur proposition. Mais à condition que ce soit à ma manière »